Les Magnificent 7, plus aussi magnifiques
Keytrade Bank
keytradebank.be
18 mars 2025
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Et soudain, les sept toutes-puissantes entreprises technologiques qui ont dominé les bourses pendant des années perdent de leur superbe. Cette année, les Magnificent 7 sont déjà en baisse de 15 %. La suprématie de la Big Tech est-elle de l’histoire ancienne ?
Pendant plus de dix ans, les investisseurs auront bien fait d’ignorer toutes les règles de diversification. Placer tous vos fonds en actions américaines : c’était la stratégie gagnante (a posteriori). Plus précisément, dans un petit groupe de valeurs technologiques d’abord connues comme les « GAFA » : Google, Apple, Facebook et Amazon. Ces dernières années, le club a accueilli de nouveaux membres et a été rebaptisé « Magnificent 7 » (avec Microsoft, Nvidia et Tesla). Pendant longtemps, ces actions ont été le moteur de la bourse américaine. Rien qu’entre début 2023 et fin 2024, le cours des Mag 7 a augmenté de plus de 160 %. Vous avez bien lu : cent soixante pour cent.
À présent, 2025 semblent marquer un tournant. Pour l’instant, les actions américaines sont à la traîne : depuis début janvier, le S&P 500 affiche ‑5 % et le Nasdaq même ‑10 %. Mais c’est surtout le déclin des Mag 7 qui saute aux yeux, car le groupe a déjà perdu 15 % cette année, les pires performances revenant à Tesla (‑40 %). Seul Meta (+3 %) a réussi à réaliser un petit bénéfice (au 12 mars). Quand le Nasdaq a chuté de 4 % le 10 mars, pas moins de 1 000 milliards de dollars de valeur de marché se sont évaporés, une perte due aux trois quarts (750 milliards) aux Mag 7.
Par rapport au reste du marché, la tech souffre. Selon Morgan Stanley, les valeurs technologiques accusent maintenant le plus grand retard depuis 2016. Pour la première fois en un an, les hedge funds ont réduit leurs positions dans ces titres. Toujours selon Morgan Stanley, en janvier, les initiés (CEO et CFO) ont vendu leurs actions au rythme le plus effréné depuis 2021. « L’investisseur moyen » aussi semble en proie au doute.
Pourquoi les Magnificent 7 vacillent-ils ?
1. Retour des craintes de récession
L’année dernière, la politique économique aux États-Unis était axée sur un atterrissage en douceur, avec des mesures visant à réduire l’inflation sans provoquer de contraction. À présent, la nouvelle équipe au pouvoir à Washington semble avoir décidé d’une autre trajectoire qui pourra plutôt – comme elle l’admet – faire piquer l’économie du nez.
Le président Trump et ses conseillers ont soutenu qu’une cure de détox pourrait s’avérer nécessaire et que l’inflation pourrait flamber à court terme. Dans une interview, Trump a esquivé une question relative au risque de récession : « Il y a une période de transition parce que ce que nous faisons est énorme », a-t-il déclaré. Quelques jours plus tard, il a cependant ajouté qu’il ne s’attendait pas à une récession. Quoi qu’il en soit, avec les signaux contradictoires envoyés par Washington, qui souffle le chaud et le froid autour des tarifs douaniers et de ses relations avec l’Ukraine, par exemple, le doute semble s’être emparé des investisseurs. Si leur nervosité pèse sur l’ensemble du marché, les premières victimes sont les entreprises qui s’étaient hissées au sommet.
2. Valorisations extrêmes, ralentissement de la croissance des bénéfices
Après des années de hausse des cours, les Magnificent 7 sont devenus très chers. La plupart de ces actions se négocient à des ratios cours/bénéfice de 30 ou plus pour les 12 mois à venir, contre environ 22 pour la moyenne du marché.
L’année dernière, les bénéfices combinés des Magnificent 7 ont encore augmenté de 36,8 %, quand les autres entreprises du S&P 500 n’affichaient que +4 %. Néanmoins, les analystes prédisent que la croissance bénéficiaire des Magnificent 7 retombera à quelque 15 % cette année, tandis que les autres composantes de l’indice pourraient grimper à 9 %. Autrement dit, l’écart entre la Big Tech et le reste du monde pourrait se réduire, une idée qui pousse les investisseurs à revoir leur approche de concentration.
3. Prises de bénéfices après des années de surperformance
Tout ce qui monte finit par redescendre ? Ce n’est peut-être pas aussi tranché, mais après un rallye brûlant, les esprits finissent souvent par se calmer. Vu la longue durée des performances exceptionnelles des Magnificent 7, quelques prises de bénéfices étaient inévitables. Les investisseurs qui ont réalisé de beaux rendements prennent leurs précautions et veulent en encaisser une partie.
4. Pression réglementaire et climat politique
Partout dans le monde, les grandes entreprises de la tech sont dans la ligne de mire des autorités réglementaires. Droit de la concurrence, protection de la vie privée, pratiques monopolistiques… Tout cela crée de l’incertitude, à laquelle s’ajoute l’évolution du climat politique. Notamment aux États-Unis, le vent a tourné, provoquant des conflits commerciaux et d’autres sources d’inquiétude. Les Magnificent 7 réalisent près de la moitié de leur chiffre d’affaires en dehors des États-Unis. Bien que ces sociétés semblent pour l’instant moins exposées aux représailles tarifaires et aux restrictions d’exportation (à l’exception de Nvidia), le soutien affiché des milliardaires de la tech à Donald Trump n’est pas bien vu partout.
5. En attente des résultats des investissements dans l’IA
Tout le monde s’accorde désormais à dire que l’IA n’est pas qu’une tendance passagère. Pour ne perdre aucune opportunité, les grandes entreprises technologiques ont investi des centaines de milliards en infrastructures et centres de données. À présent, les adaptations rapides liées à l’IA, mais aussi les bombes DeepSeek en janvier et Manus en mars, soulèvent des questions : ces milliards rapporteront-ils ?
Une rotation est-elle en cours ?
Ces derniers mois, les investisseurs se sont de plus en plus détournés de la Big Tech au profit d’autres secteurs. Tandis que les valeurs technologiques perdent leur latin, Morningstar observe une forte surperformance des soins de santé, des matériaux de base et des services financiers au cours des premiers mois de 2025. Aux États-Unis spécifiquement, les banques, les assureurs, les compagnies pétrolières et gazières et les conglomérats industriels ont été les principaux moteurs du marché d’actions. Il s’agit d’une rupture de style net avec la domination technologique des années précédentes.
En parallèle, les marchés internationaux et les régions émergentes se sont distingués ces derniers mois. Maintenant que l’exceptionnalisme américain a pris un coup dans l’aile, les investisseurs élargissent leurs horizons. Ainsi, le STOXX 600 Europe a déjà gagné 6 % cette année. Le Shanghai Composite (continent) est en hausse de 3,5 %, tandis que le Hang Seng Index (Hong Kong) a augmenté de 20 % (au 12 mars). Deux étoiles particulièrement brillantes au firmament européen sont les secteurs de la défense et bancaire. La bourse britannique est également en plein essor, avec des poids lourds dans l’énergie, l’exploitation minière et les valeurs financières.
De son côté, la Chine vit son propre rallye technologique. Pendant des années, les valeurs tech chinoises sont restées à la traîne, en raison des réglementations locales strictes et du conflit commercial avec les États-Unis. Mais Pékin a consenti quelques assouplissements et les entreprises chinoises se jettent à corps perdu dans l’IA. Après deux années de traversée du désert, le secteur est donc en plein comeback, notamment grâce aux faibles valorisations et aux espoirs d’une reprise de la croissance. Les analystes de Citi ont dévalué les actions américaines et revalorisé les actions chinoises.
Enfin, il y a l’aspect psychologique : les marchés ont tendance à suivre un mouvement de balancier, où l’euphorie extrême finit par retomber et les titres sous-évalués connaissent des retours en grâce. Et la domination des Magnificent 7 est telle que certains investisseurs s’inquiètent. Si tout le monde est investi dans un petit groupe de titres, est-ce bien durable ? Maintenant que d’autres actions prouvent leur potentiel sans l’aide de la Big Tech, le risque de concentration sur le marché va pouvoir diminuer. Pour certains stratèges, il s’agit même d’un développement nécessaire pour que le marché haussier puisse se poursuivre à plus long terme. En effet, au niveau fondamental, un rallye généralisé est plus sain qu’une flambée restreinte.
Au rebut, les Mag 7 ? Pas si vite
Rotation à long terme ou désamour éphémère ? Les avis sont partagés. Pour les sceptiques, la Big Tech a déjà trébuché par le passé avant de revenir en force. L’histoire nous apprend qu’Apple, Amazon et Microsoft remontent toujours la pente, de par leur force d’innovation et leur pouvoir de marché gigantesques. De plus, si l’économie s’affaiblit ou si les banques centrales abaissent les taux plus vite que prévu, les investisseurs pourraient vite retrouver leur passion pour les actions de croissance.
Pour d’autres analystes, la situation d’aujourd’hui est différente. Si la croissance bénéficiaire devient plus généralisée et que les actions de la tech n’ont plus le monopole de la surperformance, pourquoi les investisseurs reviendraient-ils au même schéma ? D’autant que de nombreux secteurs sont encore tout à fait abordables, ce qui représente une opportunité pour des surperformances à plus long terme.
La vérité se situe probablement entre les deux. La Big Tech ne va pas disparaître, mais sa domination n’est plus aussi évidente. Les actions Mag 7 ne sont sans doute plus les tickets d’or qu’ils ont été jusqu’ici : même les géants peuvent trébucher, voire perdre des parts de marché face à de nouveaux concurrents. Un portefeuille diversifié vous permettra de compenser ces revers. Bien entendu, si vous concentrez vos avoirs dans un seul secteur, l’impact risque d’être disproportionné.
Le moment est-il venu de revoir vos actions américaines ?
Pour les investisseurs, le message est clair : la diversification revient sur le devant de la scène. Dans le climat actuel, comment étendre votre portefeuille au-delà des actions américaines ? Vous pouvez par exemple opter pour une stratégie d’équipondération dans le S&P 500. En investissant à parts égales dans chaque société, vous éviterez la surconcentration dans une poignée de valeurs technologiques. Les actions américaines à faible volatilité offrent une autre piste intéressante, car votre portefeuille fluctuera moins fortement. Vous pouvez appliquer cette stratégie en investissant dans des ETF spécifiques : cherchez les termes equal weight et low vol(atility) sur notre plateforme.
Avant d’investir, consultez les caractéristiques et risques principaux des instruments financiers.